Les autorités en charge des élections dans 50 pays se penchent sur les défis de la « démocratie digitale » via les médias et les outils électroniques du vote.
Les premiers responsables des instances en charge des processus électoraux dans plus d’une cinquantaine de pays ont été réunis, du 28 au 31 mai, dans la ville de Troia (grande banlieue de la capitale portugaise, Lisbonne) afin d’analyser et d’anticiper les défis que médias numériques et technologies électroniques posent et poseront au futur aux processus électoraux, depuis la gestion des listes et les inscriptions jusqu’au vote et les déclarations des résultats.
Ce symposium d’experts, de responsables gouvernementaux, de chercheurs et de promoteurs et fournisseurs d’outils et de systèmes électroniques de gestion des opérations électorales, comme de managers de médias et de grands réseaux sociaux (Facebook, notamment), a été organisé à l’initiative de l’« International Center for Pariamentary Studies » (ICPS), en association avec la commission nationale des élections au Portugal qui ont pu réunir ainsi près de 150 participants. Dont les représentants de la HACA, M. Jamal Eddine Naji, Directeur Général et M. Mehdi Idrissi Aroussi, Directeur des Études Juridiques, aux côtés de fortes délégations dont des intervenants et panelistes de Palestine, de Jordanie, de Tunisie, du Canada, des États Unis, de Lettonie, du Bangladesh, du Cap Vert, du Sénégal, de Maurice, de Madagascar, du Royaume Uni, des Maldives, d’Espagne, de Bulgarie, du Kosovo, d’Italie, de Corée, de Nouvelle Zélande, d’Albanie, de Lituanie, de Hongrie, de Géorgie, d’Argentine, de Mali, d’Allemagne et du Portugal.
Tant les analyses, aux plans des législations, des systèmes institutionnels et/ou administratifs en charge des élections, de leur contrôle ou de la régulation (celle des médias et des réseaux sociaux comprise) que les exposés contextualisés des expériences de cette « démocratie numérique », dans nombre de pays de tous les continents, ont pointé les défis majeurs et assez complexes, politiquement, socialement et techniquement, qui menacent la votation transparente et conséquente, démocratiquement, que la participation citoyenne, notamment des jeunes et des femmes. La majorité des exposés ont, en effet, insisté sur l’importance décisive de la sensibilisation et de la mobilisation à la participation démocratique, particulièrement des jeunes de 16 à 18 ans, génération de l’ère numérique quasi-hégémonique, de nos jours et demain plus qu’aujourd’hui, sur les réflexes, les usages et comportements dans la vie de la cité. Vie qui ne peut plus se concevoir que totalement dématérialisée, y compris en ce qui concerne toutes les opérations d’expression et de mise en œuvre de la démocratie, dont le vote est le socle de base.
L’inéluctabilité du développement soutenu de la dématérialisation, partout dans le monde, des nouvelles générations des électeurs et électrices du présent comme du futur, rend plus importante que jamais, par exemple, l’importance de l’éducation aux médias, eu égard aux enjeux majeurs de l’impact des médias sur les opinions publiques et leur influence en matière de constitution des opinions et, delà, sur le devenir et l’intégrité des processus de démocratisation. À cet égard, il faut souligner la pertinence du rôle des régulateurs des médias aux plans du suivi des campagnes, de la couverture des processus et événementiels électoraux, de la promotion de la participation et de l’éducation aux médias, comme au plan de la promotion de la participation et de la représentation de la femme, et des personnes aux besoins spécifiques, sur tous les registres de cette « démocratie numérique ». Une démocratie qui confronte aussi, au plan de l’intégrité des élections, des menaces inconnues de l’ère d’avant l’âge numérique : les « fake news », l’impact des « campagnes intruses et/ou manipulatrices via les réseaux sociaux, la cyber-rebellion contre le choix démocratique du vote, la tentation des gouvernements de verrouiller ces espaces d’expression et d’animation du débat démocratique, sous prétexte, justement mais pas toujours à raison, de ces menaces potentielles et incontrôlables techniquement etc.
Une des interventions les plus remarquées, lors de ce symposium, fût celle de M. Jean-Pierre Kingsley, « Directeur des élections » au Canada (de 1990 à 2007, nommé par le Parlement à l’unanimité comme il l’exigea et l’obtint), qui démontra l’étendue grave, subtile et quasi présente, dans toute démocratie, qu’elle soit vieille ou jeune, de la concomitance entre la politique (ou le politique) et l’argent. Cette relation quasi incestueuse, en tout cas destructrice, peu ou prou, de l’intégrité des processus démocratiques, élections en premier, est, pour une grande part, responsable de la régression de la démocratie dans plus de 25 pays, depuis le début des années 90, comme le souligna, de son côté, M. Richard Soudriette, Président émérite de « International Foundation of Elections Systems » (IFES) et qui a dirigé les travaux de ce symposium. Un symposium, le 16ème qu’organise l’ICPS (après un 15ème organisé en Jordanie et auquel a pris part également la HACA, représentée alors par M. Aroussi), qui a aussi mis en exergue les importants rôles de la justice, des partis politiques, de la société civile et des activistes promoteurs de la démocratie, aux côtés des médias et leurs régulateurs, au titre de l’information indépendante, impartiale et pluraliste comme de la sensibilisation et de la promotion de la participation active à la démocratie représentative portée par les processus électoraux.