La HACA appelle, à Marrakech, à la promotion des bonnes pratiques en matière de traitement médiatique de la question migratoire
Mme Latifa Akharbach, Présidente de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle (HACA), a appelé samedi 08 décembre 2018, à Marrakech, à promouvoir et favoriser une culture de traitement médiatique précis, équitable et éthique de la question migratoire.
La Présidente de la Haute Autorité a lancé cet appel lors des travaux d’un atelier organisé par le régulateur marocain sur le thème " le rôle des médias et des régulateurs face à la crise des migrants et des réfugiés" réunissant régulateurs africains et méditerranéens en marge de la Conférence des Nations Unies sur la Migration, tenue les 10 et 11 décembre 2018, à Marrakech pour la signature du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.
Ont notamment pris part aux débats, au côté de présidents et membres du Réseau des instances de régulation méditerranéennes et du Réseau des instances africaines de la régulation de la communication, des représentants de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et du Haut-commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR) ainsi que des opérateurs audiovisuels et des professionnels des médias.
Intervenant en ouverture de cet atelier, Mme Akharbach a d’abord donné des chiffres que peu de médias relayent et qui révèlent que la réalité du phénomène migratoire est souvent méconnue et présentée sans référence aux données avérées et vérifiées. Alors qu’elle est présentée comme une crise globale, «la migration ne concerne qu’à peu près 3,4% de la population mondiale (258 millions d’hommes et de femmes) » a précisé la présidente de la HACA ajoutant que « seuls 14% des migrants dans le monde sont africains -soit 36 millions, de même que « près de 80% de ces migrants africains sont réguliers, contre 20% seulement d’irréguliers -soit 7,2 millions. Sur ce contingent de migrants africains irréguliers, a-t-elle poursuivi, les 4/5èmes restent en Afrique. Or, a-t-elle regretté, « la figure médiatique récurrente du migrant illégal est celle de l’Africain noir, de même qu’il est quasiment établi, dans tous les esprits, par ce traitement médiatique imprécis et non documenté, que la migration illégale est un phénomène qui n’existe qu’en Occident et dans les pays développés.
La présidente de la Haca a également déploré que, « l’on assiste à une banalisation de la terminologie sensationnaliste « déferlement, tsunami, invasion », à une manipulation fréquente d’images lors de la couverture des faits relatifs aux migrants et à une prolifération des fake-news sur la migration, surtout dans les médias numériques ».
Pour sa part, M. Josep Maria Guinart, membre de la Commission nationale des Marchés et de la Concurrence (CNMC, Espagne), a appelé les médias à un traitement objectif et adossé à des données vérifiées et à une couverture plus équilibrée de la question migratoire. Il a aussi insisté sur l’importance de faire entendre la voix du migrant lui-même.
Le Président de la HACA de Côte d'Ivoire, M. Ibrahim Sy Savané, a relevé dans son intervention que les médias occidentaux ont fait du migrant "une espèce à part entière", synonyme de "radeau de fortune" et a appelé à la mise en place d'un réseau ou d'une coalition qui serait en charge de réfléchir au moyen de faire évoluer le traitement de l'information sur la migration. Il a aussi relevé que le problème de mauvais traitement de la question migratoire n’était pas l’apanage des médias occidentaux et que les mauvaises pratiques en la matière existaient aussi en terre africaine.
M. Leonard Doyle, représentant de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), a estimé, quant à lui, que « l'Europe traverse une crise politique plutôt qu'une crise migratoire », appelant à reconnaître les valeurs positives de l'immigration.
Mme Gosia Bratkrajc, chargée des relations extérieures au Haut-commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR) au Maroc, a estimé qu’il y a eu une certaine amélioration de l'image du migrant dans les médias marocains durant les deux dernières décennies, ce qui, a-t-elle dit, est de nature à contribuer à un meilleur vivre-ensemble et une meilleure cohabitation entre les populations locales et les migrants.
De son côté, M. Réda Benjelloun, directeur des magazines d’information et du documentaire à la la chaîne 2M, a présenté des extraits de trois reportages ayant trait au thème de la migration. Des images qui traduisent toute la complexité de cette problématique -succès et échecs de cette douloureuse entreprise qu’est la migration-.
Les échanges fructueux, des différents intervenants avec l’assistance dont notamment des représentants des médias ont permis de mettre en lumière les différents aspects de la problématique du rôle des régulateurs dans l’ancrage de bonnes pratiques médiatiques en matière de traitement de la question migratoire.
Télécharger : Compte-Rendu de l'atelier.