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Décision du CSCA n° 04-05

01 fév 2005

 

Décision du CSCA n° 04-05 du 21 Di alhijja 1425 (1er février 2005) relative à la plainte formulée par le Parti de Justice et du Développement à l’encontre de la « SOREAD » (2M)

Le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle,

Après avoir pris connaissance de la plainte formulée à l’encontre de la « SOREAD » (2M) par le Parti de Justice et du Développement en date 17 janvier 2005, et du complément d’information présenté par lui en date du 25 janvier 2005 ;

 

Et après avoir pris connaissance de la plainte formulée au nom du journal « Attajdid » par son directeur de publication Monsieur Abdelillah BENKIRANE en date du 27 janvier 2005 ;

 

Et après avoir pris connaissance des observations de la société « SOREAD » (2M) transmise par lettre en date du 26 janvier 2005 ;

 

Vu le Dahir N° 1.02.212 du 22 Joumada II 1423 (31 août 2002) portant création de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle et notamment ses articles 3 (alinéas 8 et 13), 4, 5, 16 et 22 ;

 

Vu le Décret-loi n° 2-02-663 du 2 rejeb 1423 (10 septembre 2002) portant suppression du monopole de l'Etat en matière de radiodiffusion et de télévision ;

 

Vu le Dahir n° 1.58.37 3 en date du 3 joumada I 1378 (15 novembre 1958) portant code de la presse tel qu’il a été modifié et complété par la loi numéro 77. 00 promulgué par le Dahir n° 1.07.207 du 25 rejeb 1423 (3octobre 2002) ;

 

Et après avoir pris connaissance des documents relatifs à l’instruction établis par la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle ;

 

Et après jonction des deux plaintes pour les soumettre à une seule décision en raison du fait qu’elles portent sur le même objet ;

 

Et après délibération :

 

Considérant les griefs invoqués par la plainte du Parti de Justice et du Développement (PJD) à l’encontre de la direction de l’information de 2M selon lesquels cette direction a diffusé un programme d’information dans le cadre de ses journaux télévisés du 11 janvier 2005 qui comporterait un acharnement délibéré contre le parti et donnerait lieu à une déformation de ses positions, ce qui constituerait une atteinte à une instance politique nationale ainsi qu’une incitation de nature à ternir son image et porter préjudice à ses intérêts.

 

Et considérant les griefs invoquées, de son côté, par le journal « Attajdid » à l’encontre de la même chaîne suivant lesquels elle a diffusé, ainsi que la chaîne satellitaire « Al Maghribia », tout au long de la journée du 11.1.2005 un reportage relatif à la controverse provoquée par la publication dans ledit journal d’un article sur le « tsunami », lequel reportage comporterait un grave acharnement contre le journal, une déformation et une atteinte flagrante aux règles de l’objectivité, du professionnalisme et de l’équilibre dans la présentation des opinions et des positions ;

 

Et considérant les observations contenues dans la réponse de 2M à la plainte du PJD et suivant lesquelles elle n’aurait fait qu’exercer sa mission d’information dans le cadre de ses engagements éditoriaux qui trouvent leur légitimité dans les constantes et les valeurs de démocratie, de tolérance, de solidarité et d’ouverture qui constituent le socle de la Nation et qu’aucune démarche préméditée de nuire au plaignant ne sous tendait le reportage mis en cause. La chaîne précise par ailleurs qu’elle a auparavant proposé au représentant du parti auteur de la plainte d’exercer son droit de réponse, proposition qu il a tenu, selon la chaîne, soumettre à des conditions inacceptables pour elle ;

 

En la forme

 

Considérant que l’article 4, alinéa 1er du Dahir 212.02 portant création de la Haute autorité de la Communication Audiovisuelle dispose : « Le conseil supérieur de la communication peut recevoir des plaintes émanant des organisations politiques, syndicales ou des associations reconnues d'utilité publique, relatives à des violations, par les organes de communication audiovisuelle, des lois ou règlements applicables au secteur de la communication audiovisuelle »

 

Et considérant que si le PJD compte parmi les personnes desquelles le CSCA peut recevoir les plaintes visées par l’article 4, alinéa 1er ci-dessus, le journal « Attajdid » ne fait, par contre pas partie des personnes visées par le dit alinéa, ce qui implique de déclarer recevable la plainte du Parti de Justice et du Développement et irrecevable la plainte du journal « Attajdid » ;

 

Et sur le fond

 

Considérant qu’en vertu du Dahir portant création de la Haute autorité de la Communication Audiovisuelle, « le droit à l'information, élément essentiel de la libre communication des pensées et des opinions, doit être assuré, notamment, par une presse indépendante, des moyens audiovisuels pouvant se constituer et s'exprimer librement, un service public de radio et de télévision à même d'assurer le pluralisme des divers courants d'opinion, dans le respect des valeurs civilisationnelles fondamentales et des lois du Royaume, notamment celles relatives à la protection de la jeunesse et au respect de l'honneur et de la dignité des personnes » ;

 

Et considérant que le service public audiovisuel est sujet et acteur du projet démocratique du Maroc moderne, ce qui nécessite de la part de ceux qui en ont la charge, de ceux et de celles qui s’expriment à travers lui, et tout particulièrement lors des journaux, des reportages et magazines d’information, le respect vigilent du public dans son intelligence et sa capacité à se forger une opinion propre ;

 

Et considérant que si le CSCA n’ignore pas la difficulté de certaines orientations à laquelle les responsables de ce service public peuvent être confrontés, la mission du conseil –en sa qualité d’autorité administrative indépendante- l’oblige à veiller au respect de la liberté d’expression des idées et des opinions sans porter atteinte au droit des chaînes de service public à disposer de leur propre ligne éditoriale, et ce dans le respect des valeurs essentielles de civilisation, de modernité, de démocratie et des dispositions légales en vigueur ainsi qu’à la lumière de l’éthique professionnelle communément admise en la matière ;

 

Et considérant qu’il appartient à ces responsables, lors du traitement des question susceptibles de provoquer des controverses au sein de la société, et particulièrement pour ce qui est des programmes au cours desquels la parole est donné à des invités ou à des téléspectateurs, de veiller à l’équilibre, au sérieux et à la rigueur des prises de parole dans le respect de l’expression pluraliste des divers courants d’idée et d’opinion.

 

Et considérant que le reportage objet de la plainte comporte, à travers la déclaration de l’une des personnes interviewées, une mise en cause explicite du parti plaignant sans que celui-ci n’ait été sollicité pour exprimer son point de vue au cas il l’aurait jugé utile ;

 

En considérant que la mise en relation des propos formulés par le présentateur du programme selon lesquels le journal « Attajdid » serait proche du PJD – abstraction faite de la véracité ou non d’une telle affirmation – avec la déclaration de l’interviewé précité, était de nature à provoquer une confusion préjudiciable au plaignant dans la perception du téléspectateur ;

 

Et considérant qu’en vertu de ce qui précède, et veillant à la garantie du pluralisme des différents courants d’opinion et de pensée dans le cadre du respect des valeurs civilisationnelles fondamentales et des lois du Royaume, il importe de permettre au parti plaignant d’exercer son droit de réponse à propos de son implication explicite par l’un des interviewés dans le reportage en question dans les mêmes conditions techniques ayant donné lieu à cette implication.

 

Pour ces motifs, le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle :

 

1. Décide la jonction des deux plaintes ci-dessus mentionnées pour en traiter dans une même et unique décision ;

2. Déclare recevable la plainte du Parti de Justice et de Développement et non recevable la plainte du journal « Attajdid » ;

3. Ordonne à la société « SOREAD » 2M de permettre au Parti de Justice et de Développement d’exercer, par le biais de son représentant légal, son droit de réponse à propos de son implication par l’une des personnes interviewées dans le reportage diffusé par ladite chaîne le 11 janvier 2005, et ce dans les mêmes conditions techniques ayant donné lieu à cette implication, sans que cette réponse et sa présentation ne dépassent deux minutes ;

4. Décide de notifier copie de cette décision à toutes les parties ;

5. Décide de faire publier cette décision au Bulletin Officiel.

 

Fait au siège du Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle à Rabat le 21 Di alhijja 1425 (1er février 2005).

 

 

 

Pour le Conseil Supérieur

de la Communication Audiovisuelle,

 le Président

 Ahmed GHAZALI

 

 


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