Décision du CSCA N°62-11 DU 20 HIJA 1432 (17 NOVEMBRE 2011)
relative a la couverture des procédures judiciaires par «SOREAD-2M»
Le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle,
Vu la constitution, notamment, son article 23 ;
Vu le Dahir n° 1.02.212 du 22 joumada II 1423 (31 août 2002) portant création de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle, tel que modifié et complété, notamment, ses articles 3 (alinéa 8, 11 et 16) 11, 12, et 16 ;
Vu la loi n° 77-03 relative à la communication audiovisuelle, promulguée par Dahir n°1.04.257 du 25 kaâda 1425 (7 janvier 2005), notamment son préambule et ses articles 3, 8 (dernier paragraphe), 26 (alinéa 14), 46 (dernier paragraphe) 48, 49, 53, 63 et 81 ;
Vu le Cahier des charges de «SOREAD-2M», notamment, ses articles 29, 46, et 47 ;
Vu la Recommandation adressée par le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle aux opérateurs de la communication audiovisuelle, en date du 20 Joumada II 1426 (27 juin 2005) concernant la couverture des procédures judicaires par les opérateurs de la communication audiovisuelle ;
Après avoir pris connaissance de la lettre de la Société «SOREAD 2M», en date du 10 novembre 2011, en réponse à la demande déclairages qui lui a été adressée par la Haute Autorité, en date du 01 novembre 2011, relativement au respect des principes et des règles concernant la couverture des procédures judicaires et particulièrement la présomption dinnocence ;
Après avoir pris connaissance des documents relatifs à linstruction effectuée par les services de la Direction Générale de la Communication Audiovisuelle;
Et après en avoir délibéré :
Attendu que, dans le cadre des missions de suivi des programmes des services radiophoniques et télévisuels, la Direction Générale de la Communication Audiovisuelle a relevé un ensemble dobservations concernant le reportage sur un meurtre perpétré à Tanger, diffusé par la société «SOREAD 2M» durant lédition du 22 octobre 2011 du journal télévisé de 20H45 ;
Attendu que, dans ledit reportage, ont été diffusé, de manière claire et récurrente, des scènes identifiant laccusé, menotté, durant la reconstitution des faits sous la supervision de la police judiciaire. Par ailleurs, le reportage a présenté la déclaration dune dame qui a considéré laccusé, sans nul doute ou suspicion, comme étant lauteur du meurtre et ce, en ces termes : "Ce petit nid qui été détruit malheureusement par quelquun que jai dû côtoyer pendant la préparation de la maison "..... ;
Attendu que le cahier de charges de «SOREAD-2M» dispose que : « Dans le respect du droit à linformation, la diffusion démissions, dimages, de propos ou de documents relatifs à des procédures judiciaires ou des faits susceptibles de donner lieu à une information judiciaire nécessite quune attention particulière soit apportée au respect de la présomption dinnocence ...et de lanonymat des personnes concernées...» (29.3°) , quen sus, lopérateur a souscrit des engagements dans sa charte déontologique dantenne, notamment à larticle 1.2, paragraphe 14 qui reprend littéralement les dispositions de larticle 29.3° précité, ainsi quau paragraphe 15 qui stipule que : « Le respect de la présomption dinnocence, lorsque la procédure judiciaire en cours est évoquée à lantenne, ou le cas échéant avant même que cette procédure soit engagée, signifie que :
- la relation des faits et leur commentaire font preuve de prudence, neutralité, rigueur et honnêteté, et prennent, aussi souvent que nécessaire, un caractère conditionnel et non affirmatif ;
- dès lors quun doute raisonnable existe sur la réalité des faits ou sur limplication effective dune personne, il est évité, dans la mesure du possible, didentifier cette personne à lantenne ;
- les commentaires sont exempts de tout préjugé sur la culpabilité de la personne en cause ; les sources accusatoires sont précisément citées, les éléments non établis ou contradictoires sont relevés ; il est évité de rappeler les éventuelles condamnations antérieures sans lien avec laffaire concernée... » ;
Attendu que la Recommandation adressée par le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle concernant la couverture des procédures judicaires par les opérateurs de communication audiovisuelle dispose que : « Le Conseil recommande aux opérateurs de la communication audiovisuelle de se conformer aux principes juridiques et aux dispositions légales garantissant les conditions du procès équitable, notamment ceux relatifs au principe de la présomption dinnocence, au secret de linstruction et les implications qui en découlent, au principe du contradictoire et à la déontologie professionnelle de la presse, »;
Attendu que la diffusion, claire et récurrente, de scènes laissant apparaître le visage de l'accusé constitue une infraction aux dispositions de larticle 29 du cahier de charges de «SOREAD-2M» précité, ainsi quaux engagements souscrits par lopérateur conformément audit article ;
Attendu que larticle 28 du cahier de charges de la société «SOREAD-2M» dispose que : «Sous réserve du respect des dispositions légales et du présent cahier de charges, la société conçoit librement ses programmes et ses règles de programmation et en assure lentière responsabilité ». Il dispose également que : « La société conserve en toutes circonstances la maîtrise de son antenne. Elle contrôle, préalablement à leur diffusion, tous les programmes ou parties de programmes enregistrés.» ;
Attendu que la déclaration contenue dans le reportage précité constitue un défaut de maîtrise dantenne étant donné que «SOREAD-2M» a diffusé un reportage enregistré sans sassurer de sa conformité aux dispositions légales et à léthique professionnelle ;
Attendu que «SOREAD-2M» a affirmé, dans sa lettre de réponse, que le reportage a essayé dexploiter les éléments dinformation en toute objectivité, rigueur et sans aucune exagération ou tentative dinfluencer la justice « toutefois, ceci ne justifie pas labsence de prise de précaution lors de la diffusion de scènes représentant le visage de laccusé », tout en admettant lexistence dune bévue qui a été, néanmoins, commise « de bonne foi » ;
Attendu, quen conséquence, il se doit de prendre les mesures appropriées à lencontre de «SOREAD-2M» eu égard à ce qui précède ;
PAR CES MOTIFS :
1- Déclare que lopérateur «SOREAD-2M» a enfreint les dispositions de son cahier de charges en ce qui concerne les obligations relatives à la couverture des procédures judiciaires et à la présomption dinnocence ;
2- Décide, en conséquence, dadresser un avertissement à la société «SOREAD- 2M » ;
3- Ordonne la notification de la présente décision à la société «SOREAD-2M» et sa publication au Bulletin Officiel.
Délibérée par le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle, lors de sa séance du 20 hija 1432 (17 novembre 2011), tenue au siège de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle à Rabat, où siégeaient Monsieur Ahmed Ghazali, Président, Mesdames et Messieurs Rabha Zeidguy, Faouzi Skali Mohamed Gallaoui, Mohamed Abderahim, Mohamed Auajjar, Bouchaib Ouabbi, Talaa Assoud Alatlassi et Khadija El Gour, Conseillers.
Pour le Conseil Supérieur
de la Communication Audiovisuelle,
Le Président
Ahmed Ghazali